Mesdemoiselles chantent

Choisir la musique pour le projet artistique de la classe terminale est complexe, avec des élèves qui n’ont, majoritairement, aucune pratique musicale.

Aussi avons-nous décidé en 2017 d’entamer un projet sur trois ans. Le travail sur trois ans permet de viser une découverte du domaine artistique par la pratique, mais aussi une production intermédiaire et une production finale de qualité, qui valorise les élèves.

Intitulé « Mesdemoiselles chantent le blues », le projet faisait référence au Festival des « Nuits du Blues », qui existe depuis plus de 20 ans à Abbeville.

Pierre-Alain Vignon, enseignant d’Education Socioculturelle (ESC) en Seconde professionnelle SAPAT a animé un atelier de 24 heures, sur la conception et la mise en forme d’un répertoire, en collaboration avec l’Espace Culturel Saint André (Scènes d’Abbeville), qui a mis à disposition un studio et des moyens techniques et humains.

Laurent Cauchy, médiateur culturel de la Ville d’Abbeville a fait visiter et a présenté l’ensemble du centre culturel et les membres du personnel y travaillant, afin de favoriser une meilleure appropriation et fréquentation ultérieure de ce lieu.

Joseph Keller, intervenant musique de ce projet, a travaillé sur des reprises et des créations.

Aucune des 24 élèves participant à cet atelier n’avait reçu de formation au solfège ou à la pratique d’un quelconque instrument, ni à la pratique du chant ; Joseph Keller a commencé par sonder les souhaits des élèves quant au choix des instruments et assez vite, chacune a trouvé l’instrument qui lui convenait.

Deux textes ont été créés en classe en partant des vœux des élèves. A partir d’une idée partagée par l’ensemble de la classe, différentes phases d’une histoire étaient exprimées librement, dans le désordre.  Progressivement, à la manière d’un atelier d’écriture, certains mots étaient remplacés par d’autres qui correspondaient plus à leur ressenti. Petit à petit, la chronologie de l’histoire prenait forme ainsi que le sens qu’elles voulaient lui donner.

Nous avions écrit un projet orienté « blues », elles ont écrit du rap.

La prestation publique a eu lieu le 29 mars 2018, en présence de deux classes du lycée, de membres du  personnel enseignant et de la direction, dans la salle de concert de l’Espace Culturel Saint André. Etaient présentes également, quelques personnes de la maison de retraite dont les élèves avaient fait la connaissance lors de leurs stages.

En parallèle, un atelier de percussions a été créé le jeudi soir de 17h à 18h30, animé par l’intervenant et les deux enseignants d’ESC, dans l’espoir de créer une dynamique interne autour de la pratique musicale.

En première, le projet reposait sur un E.I.E  comprenant 28 heures qui a été associé aux autres modules de formation.  L’année a consisté à découvrir des structures culturelles,  à travailler une approche du territoire, des populations, du patrimoine culturel local. Il a été également question de découvrir des formes d’expression et de création présentes dans l’espace rural,  d’analyser et pratiquer différentes formes d’expression et de communication.

Ces rencontres et visites sur le terrain ont donné lieu à une présentation des structures, à des échanges sur les services rendus, les élèves étant particulièrement attentives à l’aspect financier, aux aides accordées pour pouvoir accéder aux services. La programmation a fait l’objet de discussions, en lien avec cet accès facilité aux concerts et événements.

Dans le cadre de cet enseignement spécifique, les élèves de la classe ont également élaboré le « PEPS hors les murs » (Parcours d’éducation, de pratique et de sensibilisation à la culture mis en place par la région Hauts de France).

Elles ont choisi des sorties culturelles pour les classes présentes au lycée l’année suivante. Elles ont aussi travaillé sur les éléments budgétaires, le prix des entrées et le transport. Les réponses aux besoins des populations dans le domaine culturel, sur le territoire proche, ont été présentées, les acteurs identifiés.

Le travail s’est réalisé en mars, il leur a semblé difficile de programmer des sorties sans connaître la programmation musicale de l’année à venir. Leur choix ne s’est donc pas porté sur la musique, mais une familiarité s’est installée avec des espaces culturels de proximité, comme l’Espace Saint André, le centre culturel « Le Rex », d’autres ont été découverts (Maison pour tous d’Abbeville, Le Safran à Amiens, etc).

L’absentéisme est récurrent, dans les classes de bac professionnel SAPAT, en particulier lors de sorties. Nous avons constaté que l’absentéisme était moindre en première qu’il ne l’était en classe de Seconde. C’est un travail sur la durée.

Enfin, la vidéo pratiquée à l’occasion de deux projets durant l’année, a plus attiré ce public que la musique. Nous en avons tenu compte pour l’année trois de ce projet.

Le projet artistique s’est déroulé entre la Toussaint et janvier 2020, à raison de trois heures d’atelier par semaine, encadrées par Joseph Keller pour la musique, et Bertrand Blandin pour l’image.

Nous avons choisi de repartir de ce qui est à la base du rap, les musiques afro-américaines, et de raconter l’histoire de femmes au travers de périodes de leurs vies rythmées par des morceaux issus de worksongs, du blues, du jazz, de la soul, du funk et du Hip Hop.

Les 30 heures du projet ont servi de support à la création de titres, repris (titres composés en classe de 2nde Professionnelle) ou créés par les élèves, et ont été illustrés par des courts métrages réalisés par les élèves.

Une mise en scène a été imaginée pour l’ensemble du spectacle (une manifestation silencieuse sur un titre, une chorégraphie réalisée sur un autre, des films courts projetés pendant les morceaux…). Les lettres de femmes qui rythment le spectacle ont été écrites par les élèves, en collaboration avec l’enseignante de lettres de la classe, Delphine Newstead. Les supports de communication, les invitations ont également été réalisés par les élèves.

Le spectacle a été présenté au « centre culturel Le Rex », le 9 janvier 2020.

Les 17 élèves de la classe ont été motivées par ce projet, qui leur a permis de se découvrir et de souder le groupe. Elles avaient hâte d’être en mai, pour présenter le spectacle au Festival Arpenteurs #1. Il n’aura pas lieu. Il reste une belle aventure humaine, de celles que nous vivons au contact de nos publics, parce que nos élèves nous font confiance, que nos partenaires nous soutiennent, que nos collègues et hiérarchies nous laissent prendre des risques.

Partenaires et soutiens financiers

DRAC et DRAAF Hauts de France, dans le cadre de la convention Culture/Agriculture –  Région Hauts de France –  Lycée Agricole de la baie de Somme

+ d’infos

Dany Greuillet, enseignant d’Education Socioculturelle, Lycée agricole de la baie de Somme

dany.greuillet@educagri.fr

Pierre-Alain Vignon, enseignant d’Education Socioculturelle, Lycée agricole de la baie de Somme

pierre-alain.vignon@educagri.fr