Bâtisseurs de sons

Du 14 au 18 janvier 2019, les 22 élèves de Terminale bac pro Agroéquipement du lycée la Germinière ont réalisé une structure originale et ambitieuse. Avant que le dernier tour de visseuse ne soit effectué le vendredi vers 15h00, il en aura fallu de l’huile de coude et des négociations.

Nous ne nous connaissons pas en ce début du mois de septembre mais le projet et surtout son élaboration va servir d’accélérateur. Très vite, les premières pistes avancées vont déboucher sur des impasses. On aborde des éléments techniques du cinéma, on regarde des extraits de Exit from the Gift Shop/Faites de Mur de Banksy.

Cependant la réalisation d’un court-métrage ou la création d’une oeuvre de street-art, un temps envisagées, ne semblent pas retenir toute leur attention.

Certes, ils connaissent cet anglais mystérieux, mais sont dubitatifs. Si Banksy détruit partiellement lors de sa vente chez Sotheby’s une de ses oeuvres, déchiqueter, détruire, ce n’est pas trop leur truc.

Ce que souhaitent les élèves c’est construire, élaborer une structure; et si elle pouvait être mobile ce serait encore mieux. Après plusieurs réflexions collectives, des schémas tracés, l’idée est arrêtée et une liste d’éléments nécessaires pour la construction, incluant ceux qu’ils peuvent récupérer, est proposée.

Dernier passage obligé, associer leur enseignant d’agroéquipement, M.Joël Busson, pour qu’ils puissent valider la faisabilité du projet. Ce qui leur tient le plus à coeur c’est de mettre en oeuvre leur savoir-faire et leur filière.

Leur terrain de jeu prendra la forme d’un module aux dimensions généreuses : 4m de long pour 2m de large avec une hauteur de 2,30m.

Le projet est lancé mais il manque encore quelque chose, un étage à la fusée ou plutôt une cabine à ce qui prendra la forme d’un tracteur aménagé en lieu d’exposition pour leur filière.

La dimension artistique s’étoffera avec la rencontre de X.Renault et P.Gleyzes de l’association Abrazik. Nous allons jouer les Phil Spector, construire avec les élèves un Wall of Sound, les outils sont déjà à l’atelier, il ne reste qu’à mettre tout ça en musique.

Dans le morceau des Beach Boys, «I wanna be around/the workshop»: les bruits de l’atelier viennent compléter et interrompre la mélodie; dans notre projet les sons de l’atelier deviendront les éléments constitutifs de la mélodie.

Avant la semaine artistique, les élèves découvriront ainsi Pierre Schaeffer, Pierre Henry et sa Messe pour le temps présent : c’est sûr, c’est plus entraînant que Étude aux objets. On passera aussi par le Dancer In the Dark de Lars von Trier et surtout par la scène où Selma (Bjôrk) perçoit le bruit des machines devenir musique (« Cvalda »).

Enregistrer des sons et les travailler grâce à des logiciels est aujourd’hui chose plus aisée et donc plus ludique. L’exemple du groupe danois Efterklang qui se met au vert sur une île minière désertée depuis des décennies pour trouver la matière de leurs prochaines compositions a quelque chose de captivant.

Un dernier passage par les films des suédois fous de Sound of Noise ou de Music for One Apartment and Six Drummers permettront de comprendre que la musique est jeu et que la création peut être drôle voire loufoque.

La musique concrète paraissait un peu abstraite aux élèves mais finalement elle devient un moyen d’utiliser une matière sonore plutôt subie en élément de création choisi.

Les élèves recenseront les différents éléments de l’atelier qui pourront nous servir pour la composition musicale : une trentaine de sources sonores seront ainsi enregistrées.

Lundi 14 janvier. Certains élèves sont arrivés plus tôt avec des éléments qui seront importants pour la construction. La classe est coupée en quatre groupes de composition musicale qui vont se relayer du lundi matin au mardi après-midi. Des plages de trois heures leurs sont consacrées pour la composition d’un mouvement.

Quelques-uns des élèves sont musiciens et seront mis à contribution. Le travail avec Xavier consiste à choisir les éléments de base du mouvement et de les étoffer avec d’autres sources enregistrées.

Les autres groupes s’attellent à la structure. Mardi soir, les quatre mouvements sont finalisés pour une durée d’environ 5 minutes. Les échanges auront été fructueux et chaleureux. Il reste trois jours et la structure est achevée, ainsi que les panneaux qui présentent la filière.

Les élèves sont sereins et déterminés. La structure est finie, les panneaux montés, l’aménagement bien avancé. La dernière journée sera consacrée à la customisation du module pour lui donner son aspect tracteur immobile et aussi la signature de la classe dans un style qui rappelle le « street-art ».

Le module a été présenté lors des portes ouvertes du lycée le 2 février 2019 et intrigue depuis. Le plaisir qu’a la classe à réécouter sa composition et la fierté d’observer leur structure est visible.

En savoir +

Le sujet consacré à ce projet par la télé locale viaLeMans TV : https://vialmtv.tv/sculpture-musicale-des-lyceens-creent-une-musique-datelier/

L’article du journal Ouest-France est consultable : https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/rouillon-72700/des-lyceens-creent-une-boite-musique-outils-6186168/

La composition peut être écoutée au lien suivant : https://soundcloud.com/user-749351732/la-boite-a-musique-outils/

Partenaires et soutiens financiers
Le réseau art’ur des établissements agricoles des Pays de la Loire, le Lycée agricole la Germinière et l’association Abrazik.

+ d’infos

Stéphane Billard, enseignant d’Education Socioculturelle au lycée agricole de la Germinière à Rouillon
stephane.billard@educagri.fr