Modeler son visage : entre masque et représentation fantasmée, les jeux de l’identité

Avec les élèves de Seconde professionnelle Service à la personne et au territoire du lycée agricole de Roanne Chervé

Naissance d’un projet

A l’origine de ce projet une journée à Vicence en Italie, dans l’atelier de la sculptrice Manuela Veronesi. Les enseignants d’Education socio-culturelle membres du GAP, ont vécu ce moment comme une rencontre fructueuse avec une artiste inspirée et généreuse.

 

Sensibilisés à la technique du modelage avec la création d’un buste en plaques d’argile, nous avons, Zizert (enseignant d’ESC au lycée agricole de Naves en Corrèze) et moi-même, décidé d’utiliser cette technique avec nos classes de Bac Pro. Chacun a monté un dossier de financement et opté pour un échange de pratique et un bilan final croisé.

 

De retour au lycée agricole de Roanne Chervé, j’ai discuté de mon expérience avec mes élèves de 3ème, plusieurs d’entre eux futurs élèves de Seconde Bac Pro Services à la personne, classe choisie pour ma future action modelage.

Rencontre avec un sculpteur roannais

Investis dans un projet photo autour de l’Auto-portrait, les élèves m’ont avoué leur souhait de poursuivre cette démarche par une approche « plus directe (de l’Art) par la terre, « pratique exercée en primaire et dont ils gardaient pour la plupart un excellent souvenir. Les planètes semblaient alignées.

 

La rencontre avec un sculpteur Roannais, Gilbert Ovtcharenko, a conforté ma décision de faire vivre ce projet. J’ai obtenu un financement auprès de la région Rhône Alpes en Juillet 2018 et entamé l’action en Septembre de cette même année.

Outil : la main, sujet : le corps dans tous ses états

La main vécue comme une réappropriation du corps et de l’apparence à travers la conception de portraits croisés, tel fut mon postulat de départ.
Cela nous a amené à poser les fondements du projet collectif et dévoiler progressivement les desseins des sculpteurs les plus célèbres de l’histoire de l’Art : de Praxitèle à Louise Bourgeois.

 

Notre objectif premier était d’amener les élèves à comprendre et ressentir la sculpture et le modelage comme arts corporels, et à saisir que « c’est l’effort qui rend performant » ainsi que le dit Manuela Veronesi.

 

L’implication des apprenants allait être double puisqu’ils seraient les concepteurs de portraits croisés, modelés, et organisateurs de la future exposition à la chapelle de Perreux, commune ou est implanté le lycée.

Etapes du projet

La réalisation de ce projet s’est déroulée sur 4 semaines avec des séances consacrées aux croquis de portraits (chacun a dessiné son binôme en tentant de capter les traits saillants et la personnalité de ce dernier), d’autres réservées à la technique du modelage et enfin des séances de création et de conception de l’exposition.

 

Le vernissage a eu lieu le 4 Avril 2019 en présence du proviseur adjoint, d’élus, d’enseignants, de parents d’élèves et d’amis. Il fut suivi d’un concert de la chorale La Source du conservatoire de Roanne.

Confronter le travail à distance

Les élèves ont pu confronter régulièrement leurs productions avec celles de la classe de l’établissement de Naves puisque leur enseignant partageait régulièrement des photos de ses ateliers.

 

Cet échange de pratique a été fécond et a motivé les élèves lors des phases de découragement et de remise en question de la technique jugée trop compliquée par certains et « salissante !»
* modelage du visage de l’Autre en argile
* Utilisation de la technique du bas relief à creux perdu
* Enlèvement de la terre et coulage de l’épreuve en plâtre
* Cassage du moule, reprise à la gouge, limer les aspérités et recouvrir le portrait mi-masque, mi-buste de barbotine (patine avec un mélange d’eau et de terre)

Une démarche mouvante pour un objectif atteint

Le travail de création a en quelque sorte suivi son cheminement, celui de la sensibilité de chacun des apprenants et des difficultés rencontrées. Par exemple le visage du camarade s’est progressivement transformé en masque antique à mi-chemin entre un visage existant et un autre enfoui au fond de l’inconscient de chacun.

 

La technique utilisée, celle « du creux perdu », s’est révélée être ardue, longue voire ingrate mais les élèves ont acquis « davantage de concentration, plus de patience, de sûreté.

 

« En fait je sais faire quelque chose de mes mains ». « C’était long et difficile, un peu décourageant mais on s’est surpris, j’aime le résultat ». « C’est pas vraiment ressemblant, on a fait des masques, des idées de nous. » « Dans la tête d’Andréa je ressemble peut-être à ça, une personne qui ne rit pas mais observe. »

 

En fin de projet, six élèves se sont inscrits à l’activité modelage de l’ALESA (association des apprenants) que j’initierai en Septembre 2019 et cinq jeunes comptent pratiquer en dehors du lycée.
Ce projet sera renouvelé l’année prochaine sous d’autres formes et en associant, dessin, modelage et photographie.

 

Merci à eux, Manuela Veronesi et Thierry Zizert pour cette belle expérience.


En savoir +
Retrouvez l’article consacré au travail de la classe de Thierry Zizert au lycée agricole de Naves (Corrèze) : http://education-socioculturelle.ensfea.fr/terrascopie-autoportraits-en-terre/

 

Partenaires et soutiens financiers
La région Auvergne Rhône-Alpes

 

+ d’infos
Pascale Beaux, enseignante en Education Socioculturelle au lycée agricole de Roanne-Chervé
pascale.beaux@educagri.fr