Plein feu sur l’écoféminisme

Avec les élèves de Terminale bac professionnel Bio-industries de Transformation du lycée agricole de Bar le Duc – EPL Agro de la Meuse.

Pour la deuxième année consécutive le Fonds Régional d’Art Contemporain de Lorraine, désigné sous l’appellation « 49 nord 6 est Frac Lorraine » a proposé à l’EPL Agro de la Meuse de s’associer pour accueillir des œuvres de sa collection.

Un partenariat privilégié avec le FRAC Lorraine

En effet le partenariat lancé à l’initiative des réseaux « Animation et Développement Culturel » de la région Grand Est a particulièrement bien pris en terre meusienne depuis deux ans désormais.

 

C’est dans ce cadre que l’EPL Agro a mis en état, dès 2019, deux salles situées dans l’espace socioculturel pour pouvoir accueillir de manière neutre et sécurisée des œuvres de la collection du FRAC Lorraine.

Frac Lorraine

L’année passée, l’action avait pour titre ECOTOPIA et traitait du climat social et environnemental. Ce projet avait été initié dans le cadre de l’action culturelle des réseaux régionaux, en association avec les trois FRAC et dix lycées agricoles de la région Grand Est.

Un accueil d’œuvres au long cours

En marge de cette exposition passée, et de manière pérenne et exploratoire, l’EPL Agro expose en dépôt, pour une durée indéterminée, des œuvres originales de l’artiste photographe Hélène Thiennot.

 

Il s’agit d’une artiste associée à un projet fédérateur conventionné avec la DRAC. Les œuvres ont été placées dans un espace de passage, vitré, de manière à offrir quotidiennement aux regards des apprenants comme des adultes une touche d’art dans leur environnement.

Photographie : Hélène Thiennot (site de l'EPL Agro Bar le Duc)

Un nouveau projet autour de l’écoféminisme

Fort de ce précédent, le FRAC Lorraine a ainsi proposé à l’EPL Agro de mettre à profit ses salles désormais consacrées à des expositions temporaires, pour un nouveau projet autour de l’écoféminisme, point fort de la collection.

 

L’idée était que le FRAC aille irriguer les territoires lorrains autour d’un même thème d’exposition, actuel et novateur pour bien des consciences.

 

Cette exposition s’inscrivait dès lors dans un cycle sur l’écoféminisme en mettant en relation la domination imposée par les hommes sur la nature, et celle que subissent les femmes.

 

L’EPL Agro et quatre autres établissements scolaires vosgiens et meusiens se sont ainsi regroupés pour monter des expositions, en lien avec ce sujet, dans le courant de l’année scolaire 2021-22.

 

Les œuvres de ce cycle évoquaient le désir d’émancipation des femmes, leur relation étroite avec la nature, la figure des sorcières et des guérisseuses, historiquement associées aux femmes.

Judy Chicago comme une évidence

Le choix des œuvres a été arrêté par les enseignants en éducation socioculturelle, Gwendoline Bordas et Lionel Faivre à partir d’une sélection d’œuvres de l’artiste américaine Judy Chicago, et véritable coup de cœur artistique.

 

Après une première période consacrée à des œuvres proches du minimalisme, Judy Chicago, se met à travailler en 1968, avec des feux d’artifices et des fusées de couleur.

 

S’ensuivent des créations pyrotechniques et des performances mêlant body-painting, danse, musique et fumigènes.

 

Dans le milieu féministe, elle devient célèbre, en 1969, lorsqu’elle crée le premier programme d’art féministe à l’Université d’État de Californie à Fresno.

 

Aujourd’hui, Judy Chicago est reconnue comme l’une des fondatrices et figure majeures du mouvement féministe artistique aux États-Unis.

Donner à voir de l’éphémère ?

Forts de cette découverte, est apparue la nécessité de créer un ensemble scénographique cohérent avec un choix de monographie dans les deux salles d’exposition.

 

Afin de pouvoir rendre au mieux de ces performances, qui,  par essence, sont forcément éphémères et à vivre sur le moment, le FRAC a réédité un ensemble de douze photographies faisant état de la longue carrière de l’artiste, et d’un aperçu global des disciplines et médias artistiques explorés.

 

Ont ainsi été présentés des œuvres de 1969 à 2012 comme Smoke bodies, A butterfly for Pomena ou la réédition d’une performance visant l’installation d’un papillon géant en feux d’artifices puis fumigènes, symbole hautement féministe.

Judy Chicago, Smoke Bodies, from the portfolio "On Fire", 1972,

Ces douze photographies étaient accompagnées d’un petit documentaire d’une dizaine de minutes faisant état des étapes de réalisations des performances pyrotechniques de l’artiste, de manière à expliquer le déroulement et l’aspect logistique de la création de ses œuvres.

 

Une deuxième salle, mise au noir, permettait l’immersion totale dans l’œuvre historique de Judy Chicago à travers le film Atmospheres, document d’archives relatant différentes performances, notamment des danses dans le désert californien.

L’exposition « On Fire ! »

Cette exposition au nom évocateur s’est tenue du 26 novembre au 19 janvier 22 et visait la rencontre entre différents groupes de l’EPL Agro :  direction, administration, enseignants et bien sûr une classe pilote, les élèves de Terminale Bac Professionnel Bio-industries de Transformation.

Ces derniers avaient été au préalable sensibilisés par Margot Delalande, attachée de conservation du patrimoine au FRAC Lorraine, au travers d’une présentation suivie d’une visite guidée.

 

Une médiation spécifique a été proposée par le FRAC Lorraine aux classes venues pour le vernissage au vu du sujet et des représentations de femmes nues, entre peinture et fumées. Ceci afin d’expliciter pleinement la démarche de l’artiste.

Des oeuvres pour explorer la condition des femmes

Cette exposition fut l’occasion de travailler autour de la condition des femmes, dans une perspective sociohistorique comparée et questionnée, de la découverte du feu préhistorique par des femmes aux Trente Glorieuses genrées en passant par les sorcières du Moyen-Age et les traditions hindoues.

 

La centaine d’apprenants qui ont vu l’exposition, des élèves de 3ème aux BTS 2ème année, ont ainsi pu découvrir le concept d’écoféminisme, totalement inédit pour eux en approchant la corrélation entre le militantisme écologiste et le féminisme.

 

Ils ont été sensibilisés à l’idée qu’une logique commune de domination et d’asservissement pouvait exister entre l’épuisement des ressources de la nature et la condition faite aux femmes.

 

L’oppresseur commun s’incarne dans une posture masculine qu’on pourrait aujourd’hui qualifier de toxique, polysémie climatique incluse.

Quel écho chez les jeunes ?

En résulte des réactions étonnées et pour beaucoup compréhensives comme l’attestent ces quelques exemples de paroles d’élèves recueillies au moyen de questionnaires de visite qui ont accompagnés et guidés cette expérience.

La plupart des apprenants ont saisi la chance qu’ils avaient de découvrir, au sein d’un établissement scolaire, des œuvres d’art émanant d’une artiste reconnue, initiative permettant de braver toutes les distances, physiques comme mentales.

 

Plus que jamais, après des années compliquées liées au contexte sanitaire, la possibilité d’accueillir des œuvres d’art trouve ici son sens ;  à la conjonction des trois piliers de l’Education Artistique et Culturelle (fréquenter, connaître, pratiquer), comme des cinq missions de l’enseignement agricole, sans parler des trois objectifs de l’Education Socioculturelle..


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Partenaires
FRAC Lorraine et EPL AGRO de la Meuse

 

+ d’infos
Lionel Faivre – Coordonnateur réseau Grand Est – Enseignant d’Education Socioculturelle – EPL Bar le Duc.lionel.faivre@educagri.fr